01 mai
2018

Montréal, 30 avril 2018 – Du 27 au 29 avril 2018, une quarantaine de femmes autochtones, paysannes et défenseures des droits humains et des territoires se sont réunies à Montréal dans le cadre de la Rencontre internationale «Femmes en résistance face à l’extractivisme». Durant trois jours, ces femmes provenant de plusieurs régions du Canada et d’une quinzaine de pays d’Amérique latine, d’Afrique et d’Asie ont échangé sur leurs expériences et leurs stratégies de résistance, et dénoncé les menaces qu’elles affrontent.

À travers le monde, les femmes sont à l’avant-plan des luttes pour la défense de la vie, de l’environnement, de l’eau et pour la défense de leurs cultures et territoires ancestraux. Alors que les projets extractifs ont des conséquences dévastatrices pour les milieux de vie partout dans le monde, affectant particulièrement les femmes, celles-ci jouent un rôle fondamental dans la mobilisation et la résistance.

Constats de la rencontre

Les participantes ont rapporté comment l’industrie extractive contamine et fait disparaître des sources d’eau essentielles dans leur région. Face à la perte de cette ressource vitale, les femmes sentent qu’elles perdent leur autonomie. La souveraineté alimentaire, pour sa part, devient toujours plus difficile à atteindre lorsqu’un mégaprojet minier ou hydroélectrique s’installe à proximité. Souvent, l’installation d’une entreprise minière empêche les communautés de pratiquer l’agriculture. Les femmes se retrouvent privées de leurs moyens de subsistance et des ressources financières nécessaires à leur autonomie.

De nombreuses femmes ont été criminalisées pour avoir tenté de protéger leur territoire et de continuer à travailler la terre. Lorsqu’elles défendent leurs terres, elles sont victimes de répression et privées de leurs droits fondamentaux. Bien souvent, elles héritent d’un dossier criminel et sont la cible de nombreux préjugés. Elles sont accusées de s’opposer au “progrès” et au “développement”. Dans plusieurs régions du monde, on les accuse même de terrorisme en vertu de lois antiterroristes qui se révèlent être des moyens efficaces de réprimer la mobilisation sociale.

L’exploitation des ressources par le secteur extractif est un enjeu politique, mais les femmes en résistance doivent souvent lutter pour être perçues comme des sujets politiques. Elles tendent à être exclues des espaces de prise de décision et de négociation. La formation politique, le renforcement de l’auto-organisation des femmes et la participation au débat public sont ainsi au coeur de leurs actions pour mieux défendre leurs territoires.

Les participantes ont également souligné les conséquences sociales des projets extractifs, dont l’augmentation des violences sexuelles. L’installation d’entreprises minières cause en effet une transformation des communautés affectées. L’arrivée de travailleurs, principalement des hommes, dans les régions minières a comme conséquence l’augmentation de la consommation d’alcool et de la prostitution. Dans un climat de conflit, plusieurs femmes ont été victimes de viols commis par des agents de sécurité des mines. Leur corps est souvent le premier territoire à défendre. L’accès à la justice est difficile, voire impossible, malgré la gravité de ces crimes.

Les femmes sont ainsi affectées physiquement et spirituellement par les actions des entreprises minières visant à briser la résistance et diviser les communautés. Comme premières protectrices de la terre, elles ressentent beaucoup de culpabilité et d’indignation lorsque les territoires sont affectés par l’industrie extractive.

“Il n’y a pas de justice ou de réparation possible lorsque les dommages sont irréversibles. Lorsqu’il n’y a plus d’arbres, plus d’eau ni de femmes libres, il n’y a plus de vie. Nous, les peuples autochtones, ne voulons pas de minières. Nous ne voulons pas de ce genre de développement.”

– Norma Sancir, Maya q’aqchiq’el, journaliste communautaire pour la défense des peuples autochtones au Guatemala et participante à la rencontre internationale

Tisser des solidarités

Bien que les participantes viennent de partout dans le monde, des résonances très fortes ressortent de leurs témoignages et de leurs expériences de résistance. Partout, les femmes qui luttent contre l’extractivisme sont confrontées aux mêmes enjeux. Cet espace d’échange a ainsi permis aux participantes de rassembler leurs forces et de renouveler leurs énergies en s’inspirant des femmes qui luttent dans différentes régions du monde.

Un constat de la rencontre est la similitude entre l’impact des nombreuses minières canadiennes sur les populations autochtones à l’étranger, et les oppressions que vivent les Premières Nations au Canada. Les participantes ont mis en lumière l’impact de cette double oppression, et une forte solidarité s’est créée entre les femmes autochtones du Canada et d’ailleurs.

Des rencontres comme celle-ci sont aussi des espaces de guérison. Les femmes ont pu prendre soin d’elles et s’exprimer librement dans un lieu où primait l’ouverture d’esprit et l’écoute. Ayant souvent le sentiment d’être isolées et impuissantes, elles ont pu créer de nouvelles alliances et renforcer leurs actions conjointes.

“Trop souvent les femmes ont été gardées dans le silence. Les femmes gardiennes de la culture, les femmes autochtones à travers le monde, vivent une tragédie. […] Elles ont un rôle majeur dans leur communauté, dans leur famille et auprès de leur société. Elles sont au coeur de leur communauté, elles sont porteuses de la vie comme la Terre-Mère.”

– Adrienne Jérôme, Anishnabe, Lac Simon, membre des femmes élues de l’Assemblée des Premières Nations Québec-Labrador (APNQL) et participante à la Rencontre internationale.

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Source :
Julia Couture-Glassco, Responsable des communications
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